Texte : L'ondée - Xavier Grall


- Photo "Rainy saturday" de Eric Montfort - 

Or donc la sécheresse avait été si âpre, si obstinée
que cette ondée-là est tombée sur le pays
comme la manne des temps bibliques :
étrange, inespérée, miraculeuse.
Oui, en pleine Bretagne, dans le plein de l'été,
la pluie nous apparut comme extraordinaire.

Elle mouilla les toits de Botzulan,
apaisa les greniers qui suffoquaient,
rendit aux ardoises l'éclat de leur azur,
puis elle chanta allègrement dans le zinc des gouttières
avant de remplir les ornières et les ravines...
L'odeur délicieuse de la terre humide
et des herbes mouillées m'est montée aux narines.
Les plus jolies femmes n'ont pas de meilleurs parfum...

Oui, un événement, cette première ondée.
Mme Laz, qui tempête contre la chaleur,
- j'aurais pu la croire ravie par l'aubaine :
"Vous savez, m'a-t-elle dit,
les estivants ne sont pas contents parce qu'il pleut,
et les agriculteur ne le sont pas non plus
parce qu'il ne pleut pas assez !"
C'est vrai qu'il est difficile de satisfaire tout le monde
et que le ciel doit en avoir par-dessus la tête
des jérémiades de la terre !

Au fond, j'ai bien de la veine
de pouvoir prendre mon bien partout,
dans le feu du soleil et dans la douceur des pluies.
Et d'avoir un jardin au bout de mon bureau.
Ça doit être ça aussi la liberté.
La liberté des plantes...

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