Texte : Pour construire la maison commune - Jeanne Signard

J’aime bien, dit Dieu, voir mes enfants rassembler
les pierres de leur pays pour construire leur maison commune.
Pourquoi vouloir remplacer la pierre chaude et vivante,
cadeau de ma nature,
par des briques creuses, friables et froides,
fabriquées de mains d’hommes ?

Cela me rappelle Babel :
tous briquetaient des briques en parlant une langue unique.
Tous avaient même visage et même nom.
Cela m’a tellement déplu, dit Dieu,
que je suis descendu confondre leurs langues
et les obliger à stopper la construction de leur tour
qui devait monter jusqu’au ciel.
Une tour, faite de briques toutes semblables,
une tour même pas habitable, juste pour me défier !

Moi, dit Dieu, je préfère vos maisons faites de pierres.
Il n’est pas besoin de beaucoup d’imagination
pour construire une tour surtout avec des briques !
On est vite d’accord et c’est vite fait :
Il suffit de les poser les unes sur les autres.

Par contre, avec les pierres, c’est plus compliqué.
Chacun arrive sur le chantier avec la plus belle pierre de sa carrière.
Vue de l’extérieur, la première mise en commun
ressemble à un informe tas de cailloux.
Certaines sont carrées, d’autres rondes, pointues, lisses, rugueuses.
Certaines sont des rocs qui ont résisté à des tempêtes répétées,
d’autres des petits galets adoucis par la caresse des vagues.

Pour que ces pierres, toutes précieuses, s’arrangent,
pour que chacun accepte de tailler sa pierre,
de la placer et déplacer à la recherche de sa juste place,
quelques disputes fraternelles seront nécessaires !
Un langage commun élémentaire suffisait à Babel.

Mais pour agencer des pierres vivantes, il faut une Pentecôte.
Seul l’Esprit-Saint peut nous donner de comprendre l’autre
dans sa langue maternelle
et d’éviter ainsi les trop nombreux malentendus
et la confusion des langues,
ennemis mortels du "Vivre et agir ensemble".

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